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7 questions à Arnaud Demaegd.

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Aujourd’hui, j’ai la chance d’avoir les réponses aux 7 questions d’un illustrateur et quel illustrateur puisqu’il s’agit d’Arnaud Demaegd. Les noms des illustrateurs sont parfois, si ce n’est toujours, un peu dans l’ombre ou mal connus alors qu’un super jeu mal illustré aura plus de mal à accrocher le publique. Arnaud a un très grand nombre de jeux à son actif et quels jeux ! Caylus, Sylla, Yspahan et Myrmes (une de mes illustrations préférées), la liste est longue mais c’est une liste prestigieuse. Au sein d’Ystari Games, Arnaud travaille avec son frère Cyril et plus occasionnellement pour d’autres éditeurs.

Voici donc sans attendre 7 questions à Arnaud Demaegd

1- Quel âge aviez-vous lorsque vous avez joué à votre premier jeu de société et qu’était-il ?
« Tout de suite les questions qui fâchent ! Bon, je plaisante, mais ça ne nous rajeunit carrément pas. Je n’ai pas de souvenirs de mes débuts dans le jeu de société, hormis en ce qui concerne le jeu de rôle. J’ai commencé avec L’ultime épreuve, jdr français, quand j’avais dans les neuf ans, c’est-à-dire il y a trente ans… Je jouais avec mon frère Cyril et ses amis (dont Neriac, qui illustre avec moi les jeux Ystari). Nous sommes ensuite passés à Donjons et Dragons, L’appel de Cthulhu (sans doute celui que j’ai préféré), JRTM, et une foule de jeux divers et variés. En dehors du domaine du JDR, j’ai pas mal de souvenirs sur des jeux comme Super Gang, Talisman, les jeux Games Workshop (Rogue Trooper, Kings and things  notamment), puis Civilisation… sans oublier Détective conseil, bien entendu. »

2- Pourquoi et comment avez-vous décidé d’illustrer des jeux de sociétés ?
« D’une certaine manière, je n’ai jamais « décidé » d’illustrer des jeux de sociétés. Cela s’est fait tout seul.  Pour mon tout premier jeu, un jeu de cartes nommé Dragon’ Net, l’auteur m’avait contacté. C’était en 1996, je pense. Pour la suite, c’est-à-dire ma carrière au sein d’Ystari Games, c’est un peu particulier : quand mon frère Cyril Demaegd a créé son premier jeu, Ys, il s’est naturellement tourné vers moi pour les illustrations. Nous étions amateurs, à l’époque. Je dessinais depuis mon plus jeune âge et m’étais mis à la peinture à l’huile depuis peu. L’ordinateur, c’était nouveau pour moi. Nous avons ensuite enchaîné avec un certain Caylus, qui a eu le succès que l’on sait. En réalité, je n’étais pas vraiment prêt à illustrer des jeux, d’autant que je jouais assez peu, faute de temps. Au fil de mes 30 jeux et extensions, j’ai heureusement (et naturellement) progressé. »  

3- Quels sont vos 3 jeux de société favoris et pourquoi ?
« Je vais essayer de donner des titres en dehors du jeu de rôle, même si c’est le type de jeux que je préfère (en réalité, rien ne me plait davantage que de créer un personnage pour « goûter » à un système et à un univers !). N’y voyez aucun chauvinisme (car c’est Ystari Games qui le réédite), mais mon préféré est sans doute Détective conseil  pour son originalité, la légèreté des règles, l’impression de liberté qui s’en dégage, l’ambiance. Sinon, je dirais Talisman, première édition (n’ayant pas joué à la dernière, sortie récemment). J’aimais tout simplement l’univers du jeu, même si les dés jouaient un rôle important. Dans les party games, je répondrais sans hésiter Panique au bloc, de Roberto Fraga. J’ai joué sur le prototype au festival Ludibreizh de Plouescat il y a un an, et c’était de la folie furieuse ! J’aime beaucoup jouer à Cardline de Frédéric Henri avec mes enfants. Dans l’ensemble, ma liste doit faire très passéiste, mais je dois préciser que je n’ai presque plus le temps de jouer. Produire des œuvres personnelles à côté du travail d’illustrateur est extrêmement chronophage. »    

4- Pour vous quel est la meilleure combinaison pour un illustrer un jeu avec succès ?
« Dans l’idéal, une illustration de jeu (contrairement, par exemple, à une illustration de livre) doit être à la fois belle et fonctionnelle. Je ne suis peut-être pas la personne la mieux placée pour donner la « formule du succès » car, au sein d’Ystari, j’ai tendance à faire les choses comme je les sens, avec un minimum de contraintes, ce qui est assez peu conventionnel. Mais connaissant de toute façon les contraintes de l’éditeur, je m’impose de ne pas le mettre dans l’embarras en lui fournissant des images qui lui posent problème. »

5- Comment procédez-vous pour illustrer un jeu ?
«Je travaille un peu à l’envers (je pense), parce que j’aime assez commencer par la couverture. Elle me permet de rentrer dans l’ambiance du jeu, ce qui est important puisqu’on change à chaque fois d’époque, d’univers, voire d’approche graphique. C’est ce que j’ai fait sur Myrmes. S’il y a des cartes dans le jeu, il est tout de même moins risqué (en termes de temps passé sur une illustration potentiellement ratée, puisque c’est la première que vous réalisez dans ce nouvel univers) de commencer par l’une d’elles, comme je l’ai fait pour Olympos  et Sylla. Après, ce n’est pas compliqué : il y a tellement d’éléments différents dans un jeu qu’une fois lancé, il faut enchaîner.» 

6- Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un souhaitant illustrer un jeu de société ?
« Comme je l’ai dit, l’illustration de jeu doit être esthétique et fonctionnelle. Ce dernier point est absolument crucial : il faut savoir sacrifier une image ou une partie d’image dont on est par ailleurs content, si elle n’est pas fonctionnelle dans le contexte du jeu. La clarté prime donc sur les détails. L’image doit souvent être composée en fonction du placement des icônes, par exemple. Tout cela s’apprend. Mais le conseil le plus important, c’est qu’il faut absolument savoir respecter les délais. Pour Olympos, j’ai fait les 25 cartes « technologie » en quinze jours. C’était indispensable pour tenir les délais, après le temps consacré au plateau et aux cartes « Dieux ». Je ne me suis pas facilité la tâche en essayant de varier au maximum les compositions, mais je savais ce que je faisais car j’ai appris, au fil des jeux, à gérer mon temps. Sur Prosperity, Neriac et moi nous sommes livrés à une véritable course de relai. Il y avait 75 illustrations à produire en un mois, plus la couverture du jeu. Sans compter qu’il nous fallait trouver le style graphique du jeu, ce qui peut être un processus assez long en temps normal, et que ce style devait nous convenir à tous les deux. Je ne peux pas peindre du Neriac, et Neriac ne peut pas peindre du Demaegd. C’est normal. Il nous a donc fallu trouver un style « neutre » qui nous permettait de reprendre là où l’autre s’était arrêté. J’ai passé une semaine sur la couverture pendant que Neriac commençait à dessiner les premiers bâtiments, puis je l’ai rejoint. Nous avons tenu les délais, même si nous avons tous les deux un autre travail à côté. C’était tendu, mais il était hors de question pour Ystari – et pour nous-mêmes – que nous rendions le travail en retard. Cette course contre le temps peut être frustrante, mais c’est aussi un aspect passionnant et primordial du métier. »

7- Pourriez-vous nous donner une petite information sur votre prochain projet ?
« Volontiers ! Je devrais commencer bientôt à travailler sur la prochaine extension de Sherlock Holmes : détective conseil, une campagne de trois scénarios. N’en connaissant pas encore le titre, je peux difficilement vous en dire davantage, malheureusement . 😉  »

Merci Arnaud pour avoir pris le temps de répondre aux 7 questions. SI vous voulez en savoir plus sur le travaille d’Arnaud suivez ce lien: http://www.arnauddemaegd.com/

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